Témoignages : traitement de la varroase à l’acide formique
Lors de la dernière veillée apicole deux adhérents de l’Abeille du Forez nous ont fait part de leur pratique du traitement à l’acide formique.
Encore peu pratiquée chez nous, c’est une méthode de traitement de la varroase qui utilise une molécule présente dans la nature (chez les fourmis) et qui ne laisse pas de résidus dans le miel ou la cire. Elle peut donc être utilisée en pleine saison pour diminuer la pression des acariens.
Elle est peu onéreuse mais nécessite de prendre de grandes précautions afin de préserver l’opérateur (gants homologués produits chimiques corrosifs, lunettes étanches, masque à cartouches).
Méthode pratiquée par Olivier Gachet :
Etant apiculteur professionnel en production biologique, je n’ai pas droit aux molécules de synthèse (amitraze).
Donc pendant longtemps (depuis 1999), j’ai utilisé le thymol (fin d’été) combiné avec de l’acide oxalique (en hiver).
Depuis trois ans, j’expérimente l’utilisation de l’acide formique en méthode flash. L’été dernier j’ai traité 150 ruches 10 cadres avec ce produit.
Voilà comment je m’y prends :
Le premier traitement se fait en août. Il consiste en une application de solution d’acide formique à 65 % imprégnée sur 2 couches de papier « essuie tout ».
Le support imprégné va diffuser pendant quelques heures dans la ruche sur les têtes de cadre, sous le nourrisseur à l’envers.
Afin que la concentration dans l’air de la ruche soit suffisante, je réduis l’entrée et ferme le fond grillagé par son tiroir. Tiroir qui est très pratique pour contrôler la chute naturelle de varroas avant le traitement et pendant le traitement.
Suivant le nombre de varroas en chute naturelle, je fais 2, 3 ou 4 passages sur la ruche.
En règle générale, 3 passages sont souvent indispensables. Je compte la chute sur une période de 10 jours, si j’ai plus de 100 varroas, je ferai 4 applications, si j’en ai entre 70 et 100, j’en ferai 3 s’ il y en a moins, je n’en ferai que 2. Je compte les varroas sur 10 % de mon rucher.
Pour préparer ma solution :
- J’utilise des gants prévus contre les acides,
- Un masque à cartouche, des bottes en caoutchouc et des lunettes,
- Attention aux projections.
Je préfère utiliser de l’acide à 80 % que je dilue dans l’eau et je contrôle la concentration avec un densimètre à acide (en vente chez Icko).
Les bidons à 65 % du commerce ne sont pas toujours fiables.
Pendant l’application, j’utilise un bidon en plastique pour transporter l’acide, un couvercle en plastique également pour imbiber mon support et un pistolet drogueur à bestiaux pour prélever la solution et l’appliquer sur le support.
Les deux feuilles de papier « essuie tout » imbibées de 30ml sont ensuite déposées sur la grille à reine ou sur un plastique de 15 cm x 15 cm placé sur la tête de cadre.
J’imprègne toujours le support à côté de la ruche pour éviter les projections sur les abeilles.
Au moment de l’application, la ruche émet un fort ronflement, le produit est puissant, mais de courte durée. Je fais toujours le traitement à une température de 20 °C MAXIMUM ; donc le soir après 18 h ou par une journée de pluie.
La chute des varroas lors du premier traitement est impressionnante. Dès le lendemain matin, on peut lever le tiroir du plancher pour constater l’efficacité du traitement et retirer le support.
Le deuxième passage est systématique. Je le fais 4 jours après le premier.
Après 3 à 4 passages, je n’ai pas constaté de perte de reine, ni d’expulsion de couvain mort. Les vieilles reines supporteraient moins bien l’acide formique.
Le renouvellement des reines de deux ans m’évite d’avoir à considérer les vieilles reines.
Je complète le traitement avec un passage à l’acide oxalique mélangé à un sirop 50/50 en période d’absence de couvain (entre le 15 déc et le 1er janvier).
Les colonies en ruchette 5 ou 6 cadres ne sont pas traitées à l’acide formique.
D’après Chapelot, le volume intérieur ne convient pas au traitement flash. Les ruchettes sont traitées en été à l’acide oxalique par pulvérisation (acide oxalique dissous dans de l’eau) sur les faces de cadre avant la ponte de la nouvelle reine (toujours hors couvain) et en hiver par dégouttement.
Ma méthode n’est pas encore parfaite, je dois perfectionner le comptage des varroas pour mieux évaluer l’infestation et développer le piégeage des varroas pendant l’hiver pour supprimer les souches persistantes avant le printemps.
Quant à l’efficacité de l’acide formique, elle n’est certainement pas de 100 %, mais elle ne laisse pas de résidus ni dans les cires ni dans les produits de la ruche et combiné avec des soins pour renforcer l’immunité des abeilles (solutions de propolis, oligoéléments et vinaigre de cidre dans les sirops et candis) j’ai pu limiter les pertes hivernales et la pression Varroa d’une manière générale sur tous mes ruchers.
Pour ceux qui veulent en savoir plus sur l’acide formique, je conseille de visiter le site : blog regnault acide formique en pdf hébergé par ick.com, ainsi que « le guide technique varroa » de l’adapic pour mieux connaître notre ennemi n°1 et toutes les méthodes de lutte. ADAPIC Cité de l’agriculture 13 avenue des droits de l’homme 45921 Orléans cedex 9 adapic.asso@wanadoo.fr.
Méthode pratiquée par Jim Siclon :
L’aération des plateaux est fortement réduite par une plaque (tiroir Nicot ou autre) et les entrées sont réduites à 5 passages.
- La température extérieure est inférieure à 20°C le jour.
- Vers 19h00, 30 ml d’acide formique à 65% sont répartis avec prudence sur une lavette synthétique (dimensions A4) qui est placée sous la grille du plancher, sur le tiroir ou la plaque.
- Le lendemain vers 8h00 – avec les protections – enlever les lingettes qui contiennent encore de l’acide.
L’opération est répétée 8 à 10 jours après.
La chute des varroas se poursuit pendant 4 à 6 jours (vérification sur lange graissé).
Premier traitement le 31 août.
R 1 | R 2 | R 3 | R 4 | R 5 (essaim) | R 6 (essaim) | R 7 (essaim) | |
DOSAGE | 20 ml | 30 ml | 33 ml | 30 ml | 20 ml | 20 ml | 20 ml |
J + 1 | 30 | 600 | 700 | 400 | 20 | 40 | 150 |
J + 2 | 20 | 110 | 300 | 80 | 10 | 50 | 70 |
J + 3 | 15 | 100 | 250 | 50 | NC | 30 | 90 |
J+ 4 | NC | 60 | 100 | NC | NC | NC | 60 |
La même opération a été refaite le 10 septembre, dans les mêmes conditions météo.
R1 | R 2 | R 3 | R 4 | R 5 (essaim) | R 6 (essaim) | R 7 (essaim) | |
DOSAGE | 20 ml | 30 ml | 33 ml | 30 ml | 20 ml | 20 ml | 30 ml |
J + 1 | 110 | 400 | 600 | 200 | 60 | 50 | 170 |
J + 2 | 50 | 150 | 350 | 90 | 30 | NC | 90 |
J + 3 | NC | NC | 200 | 50 | NC | NC | 50 |
J+ 4 | NC | NC | NC | NC | NC | NC | 50 |
Observations :
- Pendant la nuit, léger bruissement.
- Pas d’agitation importante.
- Pas de désertion.
- Pas de mortalité de reine.
Toutes les ruches ont reçu un traitement hivernal à l’acide oxalique pendant la période hors couvain.
Il semble que ces deux pratiques, si elles diffèrent par quelques détails, ont en commun deux facteurs essentiels ; La température du traitement inférieure à 20°C pendant la journée.
La durée du traitement est très courte, de 12h00 environ. Ce qui semble expliquer la faible incidence sur les reines et les abeilles souvent mentionnée dans d’autres protocoles.
Marc Fougerouse
Bulletin N°73 Juillet 2014